Visionair 2012

Sketching the imaginar. Esquisser l’imaginaire ou petite archéologie de vestiges immatériels.

Intervenants : Laurence Mauderli et Laurent Greslin
Projet de recherche fondamentale : Visionair / Fraunhofer IPK / ESAD
Si le virtuel n’est en somme qu’un objet en puissance, un potentiel ou un possible, son modus operandi, quant à lui, est pourtant bien concret. Outre son caractère divertissant et ludique, l’action de dessiner des objets ou fragments d’objets en 3D dans un espace immersif appelé cave (prononcé [keiv] dans le jargon informatique émaillé de termes anglais), ce qui en français équivaut à grotte, n’a rien à voir avec l’art pariétal paléolithique. La topographie de la grotte en question n’a pas le relief tourmenté des grottes de Lascaux ou de Chauvet, ni d’ailleurs leurs dimensions, et ses usagers ne sont plus des Homo sapiens.
Cette cavité de 2,5 x 2,5 x 2,5 mètres est constituée de parois lisses munies de capteurs et est reliée à un ordinateur. En soi un dispositif de haute technologie, un médium en réseau, opérationnel s’il a en son sein un usager muni de sa paire de lunettes 3D et d’un « stylo » ou « crayon » équipé de capteurs intégrés. Un dispositif complexe qui demande à l’usager un temps d’adaptation (quoique relativement bref) mais qui, une fois celui-ci adapté, lui permettra de dessiner dans l’espace à peu près tout ce qui lui traversera l’esprit. Vous l’aurez compris, afin d’éviter l’état d’hypnose ou l’assujettissement à la machine, il s’agit d’avoir un projet de recherche bien réel qui nous rassure bien que l’Homme (et la femme) ne s’égareront point dans les méandres du simulacre et de l’immatériel !
En 2012, le projet de recherche fondamentale, intitulé « Sketching the imaginary » initié et mené par Laurence Mauderli, historienne et théoricienne du design, Laurent Greslin, designer tous deux enseignants à L’ESAD de Reims et Johann Habakuk Israel, docteur en ingénierie informatique et chercheur dans le département « Virtual Reality Solution Center » (centre de solutions en réalité virtuelle) du Fraunhofer IPK, « Institut für Produktionsanlagen und Konstruktionstechnik » (Institut pour les systèmes de productions et technique de construction) à Berlin, a été sélectionné par Visionair, un réseau européen d’infrastructures dédié aux installations de visualisation haut-de-gamme, ouvert aux chercheurs en Europe et dans le Monde.
Un des objectifs de ce projet a été d’explorer, de découvrir et de nous approprier la technologie immersive visuelle et haptique de la réalité virtuelle – telle qu’elle est développée au « Virtual Reality Solution Center » du Fraunhofer IPK, de Berlin – de travailler sur l’interrelation corps/espace/objet et d’établir un dialogue stimulant voire intriguant entre approche empirique et débats théoriques, entre design et réalité virtuelle, entre 3D et 2D et vice-versa. De manière plus spécifique, la possibilité de travailler directement à échelle 1 :1 dans la grotte, d’aborder graduellement des questions soulevées par l’artisanat numérique comme champ du design, d’expérimenter la pollinisation croisée entre le travail d’atelier et la production dans la grotte, des croisements entre design et ingénierie fut un de nos leitmotivs pendant ces deux semaines.
« Sketching the imaginary » a été l’occasion d’allier design et réalité virtuelle de manière tout à fait inédite pour une école d’art et de design française. Notamment, de travailler directement à échelle 1 :1 avec des outils de réalité virtuelle haut-de-gamme en abordant de manière approfondie des questions soulevées par l’artisanat numérique comme nouveau champ du design. Dessiner en 3D dans l’espace permet en effet d’accroître ou de développer une autre sensibilité visuelle, manuelle, haptique qui a de plus un impact sur notre manière de voir et de percevoir, tant l’objet dessiné que l’espace qui le contient. En outre, l’expérience unique du résultat de l’échelle 1 :1 en temps réel, qui est à la fois dessin et matière est une des caractéristiques qui a le plus séduit les participant(e)s.