DNSEP Art 2020 : Chloé Charrois
Il y a dans nos maisons une poésie qui naît à la limite du langage : nos possessions et nos trésors nous racontent, sans avoir à prononcer un seul mot. Goffman dit que chez nous on se cache et on se montre. Je crois aussi qu’on cache que l’on se montre et que l’on montre que l’on se cache. Ici, les objets et les dessins abritent effectivement une narration secrète.
Un personnage, que j’appelle la Campeuse, me sert de porte d’entrée, de port d’attache pour naviguer dans des cultures vernaculaires et les rendre intimes, hantées de traumatismes ordinaires.
Vous êtes dans son espace, où les alcôves sont devenues des gîtes à la rêverie. C’est un espace où elle a pu se blottir et rêver de temps et de lieux différents.
Dans l’isolement le temps s’allonge, s’épaissit. La Campeuse collectionne, dessine, assemble, donne
patiemment vie à son espace. Ça rappelle les dessins de la jeunesse, les images copiées presque pieusement. Les heures passées à faire transforment les images et les objets en amis imaginaires, en compagnons de solitude.
La Campeuse n’a d’accroche nulle part. Elle navigue dans un monde mineur auquel elle voudrait appartenir et dont elle rejoue librement les codes. Elle fait tout dans la solitude, mais c’est une solitude
qui désire le monde. Plutôt que de faire partie des foyers, collectifs ou intimes, elle les imite comme
les enfants qui reproduisent les rituels des grands.